Publié le par Hélène R. dans les rubriques Dérivations existentielles

Jim does not pray the Lord.

Jim erre dans les rues de la ville, seul parce qu’il est tôt et que les autres sont rentrés chez eux déjà ; la lumière s’impose à son œil flou comme une farce, lui qui voudrait tant que la nuit se prolonge ; Jim marche, il se laisse porter par ses jambes sans souvenirs ni de sens à demain. Il sent entre ses doigts le goulot d’une bouteille, en boit l’alcool restant ; autour les passants réveillés s’amènent et ne le comprennent pas. Ils ont ces mots qui collent, ces étiquettes qui décrivent au rabais l’âme des gens, ils sifflent entre leurs dents : « alcoolique, pss pss pss, voyou, pss pss pss, jeune déséquilibré, ssss… » Vipères. Jim s’en fout, ses vêtements sont trempés, ça l’amuse ; les rayons du soleil commencent à lui lécher la peau, encore une belle journée qui s’annonce. Sur l’écran de son téléphone quelques appels en absence, il ne se souvient pas. Vivement que les copains lui racontent, vivement ce soir qu’on remette ça.

Heureux. Content. Allongé sur les berges du fleuve, un vieux livre à la main, ses vêtements éparpillés dans l’herbe ressemblent aux morceaux d’un humain qu’on aurait dépecé pour en créer un neuf, nu comme un ver et luisant de sueur, Jim tourne les pages une à une en finissant sa bière. Il baiserait bien ce soir. Les mots dans son carnet parlent des femmes comme des dunes brûlantes, du sable qui s’égraine et disparaît aux vents, des cheveux en cascade, noirs, que l’on tient dans sa paume la fraction d’un instant, rugir. Les mots dessinent les seins qui respirent par saccades sous le tissu léger, dans la main, le ventre qui se gonfle, qui s’emplit de chaleur, et le dos qui se cambre… Jouissance hallucinée… Le cul, les jambes, les pieds, les lèvres humides, ses doigts qui s’y enfoncent… Le sexe dur et tendu, Jim se lève et ramasse ses affaires, sa chemise, son blue jean, son caleçon et rentre à pieds chez lui se branler. Tout en marchant il poursuit son rêve érotique. Entre ses jambes, le plaisir frustré s’impatiente, mais la douleur lui fait du bien.

Il est beau, il n’a pas peur de ne pas tout savoir et c’est mieux ainsi puisqu’il y a tant de questions qu’il a décidé de ne plus se poser. Ceux qui l’entourent lui veulent du bien et à sa mère il y pensera plus tard, il veut apprendre de sa jeunesse et des plaisirs qu’on s’autorise lorsque l’on sait que rien ne dure, ni même la vie, ni même l’amour, ni même le rire qui tristement au fil du temps devient distant. Il ne voudrait pas s’arrêter trop longtemps au même endroit, finir par penser la vie en surface sans en connaître les palpitations, il aurait vite fait de s’ennuyer s’il décidait de s’attarder, de ralentir ; trop impatient il s’enfuirait déjà parti dans le lointain que seules quelques âmes peuvent rejoindre. Il est libre. Il est libre et c’est de cette liberté dont je suis tombée amoureuse.

Il m’inspire, c’est un homme qui ne dévisage pas les autres qui marchent de travers.

Il m’attire quand je bois mais sobrement je l’aime avec force douceur.

Il sublime notre sort en reniant tout le drame et la peur.